- EAN13
- 9782072454219
- Éditeur
- Gallimard
- Date de publication
- 06/02/2014
- Collection
- Blanche
- Langue
- français
- Langue d'origine
- français
- Fiches UNIMARC
- S'identifier
Autre version disponible
-
Papier - Gallimard 19,50
Les ressemblances de famille s'attachent à des motifs saugrenus : la forme
d'un nez, un grain de beauté, une allure décidée, mais aussi un tempérament
sexuel ou une maladie héréditaire. Relier des êtres qui se ressemblent –
l'enfant à ses parents, l'animal à sa race – confirme l'ordre du monde. Chacun
trouve sa place dans le déroulé des filiations. Mais parfois des formes
louches dérogent aux apparentements naturels. L'imagination des femmes
enceintes fut souvent alléguée pour expliquer ces bizarreries. Plus
rigoureuses, les sciences du vivant s'employèrent à trouver la raison
généalogique permettant de distinguer entre les semblables. Le siècle de
Darwin, féru de typologies, inventa des familles d'oreilles et de crânes pour
décrypter les physionomies saines ou criminelles. La codification des types
est cependant menacée par l'extension infinie des airs de famille qui
suggèrent un vertige : n'importe qui peut ressembler à n'importe quoi! Aux
portraits-robots ils opposent le flou photographique des visages. Wittgenstein
s'en inspira pour modifier toute la grammaire des parentés. Lorsque ces airs
sont aussi entêtants que des musiques, ils deviennent des affinités. Ce mot
ancien désigne des échanges subtils entre des sujets, selon le milieu et
l'occasion. Réactualisé par les sites de rencontres, il se réduit aujourd'hui
à l'assortiment des mêmes goûts. Mais les affinités, au contraire, composent
avec le dissemblable. Leurs voisinages magnétiques effrayèrent Kant et Goethe.
Insidieuses ou fulgurantes, les affinités transportent une puissance de
désaffinité.
d'un nez, un grain de beauté, une allure décidée, mais aussi un tempérament
sexuel ou une maladie héréditaire. Relier des êtres qui se ressemblent –
l'enfant à ses parents, l'animal à sa race – confirme l'ordre du monde. Chacun
trouve sa place dans le déroulé des filiations. Mais parfois des formes
louches dérogent aux apparentements naturels. L'imagination des femmes
enceintes fut souvent alléguée pour expliquer ces bizarreries. Plus
rigoureuses, les sciences du vivant s'employèrent à trouver la raison
généalogique permettant de distinguer entre les semblables. Le siècle de
Darwin, féru de typologies, inventa des familles d'oreilles et de crânes pour
décrypter les physionomies saines ou criminelles. La codification des types
est cependant menacée par l'extension infinie des airs de famille qui
suggèrent un vertige : n'importe qui peut ressembler à n'importe quoi! Aux
portraits-robots ils opposent le flou photographique des visages. Wittgenstein
s'en inspira pour modifier toute la grammaire des parentés. Lorsque ces airs
sont aussi entêtants que des musiques, ils deviennent des affinités. Ce mot
ancien désigne des échanges subtils entre des sujets, selon le milieu et
l'occasion. Réactualisé par les sites de rencontres, il se réduit aujourd'hui
à l'assortiment des mêmes goûts. Mais les affinités, au contraire, composent
avec le dissemblable. Leurs voisinages magnétiques effrayèrent Kant et Goethe.
Insidieuses ou fulgurantes, les affinités transportent une puissance de
désaffinité.
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